« Aime ton prochain comme toi-même » ne pose vraiment problème que si on laisse le mot « aimer » se laisser envahir par des notions d’affection ou d’attachement romantique, auquel cas la citation des Écritures devient incompréhensible, voire inacceptable.
En effet, je n’éprouve pas beaucoup d’affection pour moi car je me connais un peu trop bien pour cela. J’avoue également n’avoir pas été très impressionné par les gens amoureux d’eux-mêmes, m’étant souvent dit qu’ils auraient sans doute pu trouver mieux dans l’autre, même si ma connaissance de moi et ce que le monde m’a laissé voir de lui-même m’ont conduit à douter de cela aussi.
En revanche, je peux parfaitement m’aimer si, par ce mot, j’entends la définition que j’ai déjà proposée : souhaiter, désirer, vouloir mon bonheur, c’est à dire un état de contentement stable et joyeux. Je peux également aimer mon prochain de la même façon.
Tout cela, je peux le faire parce que, la poutre de l’affection étant tombée de mes yeux, je sais qu’il y a bien du chemin à parcourir pour atteindre le bonheur ou le fait d’en être digne, et cela pour nous tous, si l’on excepte quelques saints cachés çà et là.
Le mystère de l’amour de Dieu devient également non pas compréhensible, mais du moins envisageable : il n’entraîne pas nécessairement une affection digne des pires chansons sentimentales mais peut se révéler dur et austère lorsque le but poursuivi, c’est à dire notre bonheur, l’exige. Parce qu’enfin, à tout prendre, nous sommes tout de même de bien vilains garnements, voire pires que cela.
Il existe une vertu divine assez peu évoquée mais qui me laisse pantois : c’est le courage devant l’énormité de la tâche à accomplir pour apprendre quelque chose de bon à l’humanité. Quant aux raisons de son amour pour nous, j’avoue qu’elles me laissent perplexe. T’avouerai-je, lecteur, que dans mes pires moments, c’est seulement son amour qui me permet de nous voir avec pitié ?
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