(Au cœur de la nuit,
Pierrot mon ami,
prête-moi ta pluie
pour couvrir de pleurs
la vie qui détruit
tous les gens d’honneur.)
Lorsque s’en vient la nuit
Et que je suis sans feu,
J’arpente les ruelles
En quête de chandelles,
Mais tous se sont enfuis
De ces étranges lieux
Où la vie m’a conduit
Quand je me suis fait vieux.
J’arrive à une église
Et je toque au vantail,
Puis j’attends dans le soir
Comme s’en vient le noir ;
La brise devient bise
Et je fuis le portail
Pour marcher à la guise
Du vent qui me travaille.
Y-a-t-il un décret
Pour m’épargner le glas ?
Oh Seigneur, dans tes cieux,
Révoque-le, mon Dieu !
Fils, à dire le vrai,
Moi je ne t’aime pas :
Je sais que je devrais,
Mais je ne le peux pas.
Te tuer me plairait
Mais moins que te sauver :
Profite de la vie,
Danse ! Cours ! Vole ! Ris !
Qui me consolerait
Si tu devais crever
Sans hargne ni regret,
Sans personne à aimer ?
Espèce de sadique !
Que t’ai-je fait, mon Dieu ?
Tu es né, petit con.
Tu as vécu, morpion.
Cela me fout la trique,
Sandestin de mes deux,
De te voir, pathétique,
Ramper devant ton Dieu.
Qui crois-tu célébrer
Dans une église humaine ?
Ton Jésus minuscule ?
Sa mère ridicule ?
Le Seigneur des armées
Se moque de ta peine :
Arrache-toi, pygmée,
Reprends ta course vaine.
Un peu anéanti
Par ce discours brutal,
Je repris mon errance
Et rentrais dans la danse ;
Je rejoignis la nuit,
Néant qui m’est fatal :
Décidément, l’ami,
Mon Dieu n’est pas banal.
L'Avenue du Ciel (table des matières)
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