mardi 28 octobre 2025

Mélopée du larron

 

Jésus,

Souviens-toi de moi

Lorsque tu viendras

Avec ton royaume.



Note : Ceci est le texte de la demande que le bon larron fait au Christ tel qu’on le trouve dans l’Évangile selon Saint Luc (23 39-43) de la Bible de Jérusalem (CERF, 2011). Ayant eu l’occasion d’entendre la prière du cœur des Chrétiens Orthodoxes, j’ai cherché pour mon usage personnel un texte simple, rythmé, facile à répéter et chargé de sens. Par chance, j’ai remarqué que tel était le cas de ce qui précède, et cela sans la moindre altération ni invention. Comme je le fais toujours en marchant, surtout si personne ne peut m’entendre, je me suis mis à essayer de le chanter, ce qui aide grandement à la concentration et à l’inspiration.

Encore une fois, n’étant pas musicien, ne vous attendez à rien de grandiose, ce qui n’est d’ailleurs pas le but recherché. J’utilise un dizainier ; sur les neufs premiers grains, je chante la première version dans la portée, et la seconde sur le grain restant. Un « Gloire au Père », un « Notre Père » (imitant ainsi le rosaire), et me voici revenu au point de départ.

Notez toutefois que je ne le chante pas exactement ainsi ; toutefois, retranscrire exactement ce que je dis dépasse mes capacités en musique et dans la manipulation du logiciel « MuseScore ». C’est la longueur du dernier silence avant la préposition « avec » qui me pose problème : celui que j’émets, ou plutôt n’émets pas, mesure sans doute une double croche ou une croche, et non une noire. Quant aux accents, je les place en fonction de mon inspiration du moment mais ceux que j’ai indiqués dominent le plus souvent.

Enfin, souvenez-vous que je ne suis pas un membre du clergé et que rien de tout cela n’a été approuvé par l’Église. Je n’invite donc personne à m’imiter, mais comme le fait de savoir que d’autres que moi faisaient de telles choses m’aurait aidé, je publie ici quelques éléments d’une démarche qui intéressera peut-être quelqu’un, à commencer par mon seul lecteur connu, que je salue.




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samedi 25 octobre 2025

Mélopée du promeneur

 

Ma demeure est dans le palais du Seigneur,

Mon abri est sous le toit du Saint Esprit,

Mon logis en la maison de Jésus Christ.


Note : Ce texte s'appelle mélopée parce qu'il est fait pour être chanté (en marchant, dans mon cas). Bien que n'étant pas musicien, j'ai essayé de retranscrire ce qui m'est venu à l'aide du logiciel MuseScore, d'où l'image qui suit.


L'Avenue du Ciel (table des matières)

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mercredi 22 octobre 2025

Le vingt-et-unième courrier

 


Cher ami,

Le père Athanase, sa fille et leurs deux assistants (qui m’ont fait l’effet de membres de forces spéciales bien plus que de chercheurs en quelque discipline que ce soit) sont arrivés à bon port depuis six jours, et nous n’avons pas chômé.

J’imagine que c’est Nadine qui t’a suggéré de ne pas me dire qui était, au juste, la fille du père Athanase ? Je crois reconnaître le coup de patte de cette finaude dans cette... tromperie ? Mascarade ? Scène de Commedia dell’arte ? Tu pourras la féliciter pour ce petit chef-d’œuvre d’humour féminin. J’ai dû, je crois, mettre environ un quart de seconde pour passer du rôle de guide accueillant et bienveillant à celui de collégien timide et empressé – à mon âge ! Suis-je paranoïaque en m’imaginant que les deux femmes étaient complices dans le crime et que ta chère et tendre a eu droit à un long rapport téléphonique, ou que vous avez déjà bien ri de votre farce, gredins que vous êtes ?

Tu me revaudras cela, sacripant. Je ne sais pas comment, mais je ne connaîtrai pas le repos avant de m’être vengé. Te rends-tu compte que je suis affolé à l’idée de devoir choisir les vêtements que je vais mettre pour un simple dîner au restaurant ? Et dire que je me croyais assagi par l’âge et mortifié par l’expérience que tu connais… Avoir passé plus de quarante années sur cette terre et n’avoir toujours rien appris, quelle douche froide !

J’allais me mettre à parler de Svetlana mais je m’aperçois qu’il ne me reste que deux ramettes de papier. Ce sera donc pour une autre fois.

J’ai logé tes envoyés dans une très jolie maison située à deux pas de la mienne, mais malheureusement – ou fort heureusement – hors de ma vue. Pour quatre personnes, je me suis dit que ce serait pratique et ils ont eu l’air satisfait. Surtout, que personne ne s’inquiète du prix ! Il suffira de payer les factures d’énergie. C’est la résidence secondaire de gens que je connais très bien et ils se sentiraient insultés si on leur demandait de la louer.

Venons-en à présent aux différents objets de la présence du père Athanase. Comme tu l’as sans doute déjà appris, notre visite du bois où Satan est censé avoir un trône ne s’est pas très bien passée. Au delà de sa découverte du charnier d’embryons avortés provenant sans le moindre doute de cliniques locales puisque, si j’ai bien compris, ils n’ont jamais été congelés et sont à des stades de fraîcheur assez divers, il y a eu l’épisode de l’ange. Mais reprenons les faits dans l’ordre.

Nous avions garé les voitures dans le parking situé au début du parcours de santé, à environ deux kilomètres des premiers bâtons liés. J’aurais bien aimé trouver mieux mais, avec tous les travaux qu’il y a en ce moment, ce n’était guère possible. De fait, ce fut un coup de chance car le père nous mena tout droit à un pentacle bien plus proche dont j’ignorais l’existence (Pourquoi ce nom de pentacle ? Parce que pourquoi pas. Je n’ai pas mieux sous la main.) Nous creusâmes donc à l’endroit qu’il nous désigna pour découvrir des bocaux dont tu connais le contenu. Je pense que tu peux aisément imaginer l’humeur de notre petit groupe après cela. Comme convenu, dans le doute, nous n’avons prévenu personne. Les chances de tomber sur un complice des sorciers étaient bien trop élevées. Je crois moi aussi qu’il est impossible de réaliser un projet de cette ampleur sans quelques amis à la fois haut et bien placés.

Même si nous avons pris la peine de remettre les choses dans leur état premier, il est bien possible que les initiateurs de la chose s’aperçoivent de l’absence de ce que nous avons pris. Je n’ai pas assez de connaissances en magie pour savoir ce qu’il en est vraiment, mais Svetlana m’a dit que nous avions « laissé un trou dans la trame ». C’était inévitable, je crois. Souhaitons que nos « amis » mettent cela sur le compte de promeneurs curieux. Comme nous n’avons touché qu’à un seul endroit, cela paraît possible. Je me demande à présent si nous n’aurions pas mieux fait de dévaster les lieux et d’y abandonner quelques étuis de préservatifs et des canettes vides, mais il est un peu tard pour avoir des regrets.

Après cela, le père m’a indiqué la direction de ce que je nommerai « l’épicentre », encore une fois faute de mieux, ainsi qu’une idée de la distance à parcourir. Comme de coutume en forêt, il nous était impossible d’aller tout droit mais je connaissais assez bien les environs pour pouvoir arriver à bon port. Enfin, bon, on se comprend…

L’apparition a eu lieu à environ cinq cents mètres du but, je crois. Le père Athanase était visiblement très mal à l’aise et je pense être à présent capable de dire la prière « Seigneur, prends pitié » en Russe, tant je l’ai entendue. Crois le ou non, mais je me suis vu lui tendre une bouteille d’eau lorsque son murmure s’est arrêté.

Au fait, ne t’attends pas à une description circonstanciée de l’ange. Le fait d’être le seul membre du groupe à avoir vu autre chose qu’une grande lumière n’a pas augmenté mes capacités linguistiques. Certaines choses ne sont tout simplement pas faites pour être décrites. Pas avec un langage humain, en tout cas.

Bref, nous avions repris notre marche et nous arrivions à ce que j’appelle un carrefour d’Hécate, c’est à dire à trois directions. Approprié, non ? Là, j’ai vu émerger des ombres une silhouette. Pour la décrire, je me contenterai de reprendre les mots de Saint Matthieu :

« Il avait l’aspect de l’éclair, et sa robe était blanche comme neige. »

Je ne peux pas faire mieux, mais je peux te garantir que si l’auteur de l’Évangile n’a pas vu lui-même l’apparition, celui que la lui a racontée en a été un témoin direct. Il avait bien un visage et des mains, mais quel visage et quelles mains ! Restons-en à l’aspect de l’éclair. Quant à sa voix, qu’en dire ? Elle est plus belle que celle de Svetlana. Je l’aime moins mais elle est plus belle. Elle est belle comme un katana extrêmement aiguisé, si tu vois ce que je veux dire, pas comme un jour de bonheur à la campagne.

Il a juste dit :

« Jusque là, oui. Mais pas plus loin. »

J’imagine que c’était une réponse à une prière du père. Je la lui ai répétée mot pour mot et il a semblé comprendre de quoi il s’agissait. Après m’avoir expliqué que lui, comme les autres, avait juste vu la lumière changer et entendu une sorte de bourrasque, il m’a demandé de lui dire ce que je voyais. Quand j’eus terminé, il se signa, rendit grâce à Dieu – en Français, car cet homme est d’une exquise courtoisie – puis tourna les talons. Le retour fut très silencieux.

J’aurais bien d’autres choses à te raconter mais je n’en ai pas le temps car il me faut choisir mes vêtements. Avant de te moquer de moi, souviens-toi que c’est moi qui t’ai présenté ta femme et que tu m’as choisi pour confident de tes tourments, à l’époque.

Bien à toi, donc. Mes amitiés à Nadine. Tu peux lui dire que je ne lui en veux pas. Pas trop, en tout cas.


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mardi 21 octobre 2025

Sarregamer

 

Assis à mon bureau, j’entends tomber l’ondée

Qui coule goutte à goutte au secret de la nuit

En cherchant vainement un remède à l’ennui ;

C’est ainsi que débute une longue journée.

Ça me rappelle toi,

Sans trop savoir pourquoi.


Je bois quelques gorgées de mon café tiédi

En cherchant dans la nuit la forme du feuillage

Qui un jour de soleil m’offrirait son ombrage ;

Maintenant le café s’est vraiment refroidi.

Ça me rappelle toi,

Sans trop savoir pourquoi.


Je cherche un but en moi, un besoin de bouger

Mais mon esprit s’enfuit bien loin de toute tâche ;

Je crois que ça va être un moment de relâche.

Puisque l’abîme est là, autant m’y replonger.

Ça me rappelle toi,

Sans trop savoir pourquoi.


Une petite douche, un petit déjeuner,

Et me voilà rassis à regarder la flaque

Où se mire la nue ténébreuse et opaque

Qui commence à ronger le tertre désolé.

Ça me rappelle toi,

Sans trop savoir pourquoi.


Je cherche vainement quelque chose à écrire

Et j’aligne des mots qui ne me parlent pas

Tremblant dès que j’entends le moindre bruit de pas,

Attendant le silence auquel mon âme aspire.

Ça me rappelle toi,

Sans trop savoir pourquoi.


Je pose mon stylo. La journée s’est enfuie.

Je regarde au dehors comme s’en va le jour,

Parcourant du regard les arbres dans la cour ;

La flaque s’est noyée dans un étang de pluie.

Ça me rappelle toi,

Sans trop savoir pourquoi.


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samedi 18 octobre 2025

Tube 29 (28)

 

Hymne au Seigneur du beau temps


Rapportez au Seigneur, enfants de sa bonté,

Rapportez au Seigneur le vent et sa fragrance

Qui ont baigné vos corps depuis la prime enfance

Emplissant votre vie de la joie d’être né.


Entendez le Seigneur, le Dieu de gloire rit

De vous voir vous ébattre en sa magnificence

En jouissant de la vie dont Lui-même est l’essence :

Vous êtes ses enfants, de vous Il est épris.


Le souffle du Seigneur fait pousser les forêts,

Le souffle du Seigneur habite au cœur de l’être ;

C’est sa joie qui permet à la vache de paître

Et nourrit les lapins tout comme les furets.


La voix du Créateur habite dans les eaux

Et étanche la soif de chaque créature,

Baignant de sa bonté les fruits de la nature,

Coulant dans le secret du chêne et du roseau.


La demeure de Dieu résonne de son rire :

Tout y tremble devant sa fougue paternelle

Et la joie du Seigneur y demeure éternelle,

Prodiguant sa chaleur à tout ce qui respire.


Envoi :

Lorsque nous adorons Satan et les puissances,

Le Seigneur a pour nous le regard d’un parent

Qui attend le retour de son unique enfant :

La voix du Créateur est un chant d’espérance.


Note : Aussi étrange que cela puisse paraître, l’idée de ces vers, aussi maladroits soient-ils, m’est venue en lisant le Psaume 29, l’Hymne au Seigneur de l’orage (Bible de Jérusalem, CERF, 2011). L’envoi, quant à lui, est constitué de resquilleurs qui sont montés dans le train alors que j’avais le dos tourné.


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mardi 7 octobre 2025

Un jour au parc

 

Un papillon s’envole au soleil de ta gloire ;

Un rai de lumière me dit tout ton amour

Que me chante l’oiseau qui là-haut fait sa cour

Et que conte la fleur dans les plis de sa moire.


Un lombric s’enfouit au sein de ta grandeur

Et l’araignée égraine un chapelet de pluie

Quand la limace trace une courbe réjouie

Célébrant la venue des dons de son Seigneur.


Sur une herbe une tique attend quelque passant

Dans le vœu d’accomplir un pieux pèlerinage

Loin des lieux dangereux où va tomber l’orage

Changeant les flaques d’eau en un vaste océan.


Et moi, là, sur un banc, j’attends ton arrivée

Avec tout ton royaume annoncé par la Bible,

Les yeux écarquillés devant les trous du crible

Où jamais n’entrera mon âme dépravée.


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