Discours et
anecdotes de la forêt des bambous plus hauts que les montagnes mais
moins vastes que le ciel :
Final
Comme le maître de
souffrance avait raison, mon cher Seigneur, et comme j'ai pu errer !
Tandis que tu agonisais, je dormais. Pas plus que les apôtres, je
n'ai pu m'empêcher de te crucifier par paresse et par lâcheté. Je
remplissais ma bouche de grands mots, mais que faisais-je de mon
cœur ?
Aimer, c'est vouloir le
bonheur de l'autre, et ton bonheur est mon salut. Si je veux ton
bonheur, je dois te laisser me sauver.
Je dois cesser d'empiler les
briques de ma propre prison. Pour reprendre le langage du maître de
guerre, Mara, c'est moi, le Bouddha, c'est moi : tant que je
suis mes idées, je suis prisonnier. Ce qui change, c'est tout au
plus la couleur de mes chaînes.
Je vais partir, mon cher
Seigneur, je vais partir avec toi, qui seul ne m'as jamais abandonné,
même quand je te reniais à chaque instant à travers chacun de mes
actes, chacune de mes paroles, chacune de mes pensées. Je vais aller
sur les chemins de la forêt pour y chercher ce que j'ai trouvé.
Je vais laisser ici tous ces
feuillets que j'ai accumulés. Qui sait ? Quelqu'un y lira
peut-être quelque chose ?
Je vais partir sur les
sentiers, comme l'ont fait tant de ces moines qui me sont devenus
chers, sans aller où que ce soit mais sans plus m'enfermer.
Je regarde les murs de ma
hutte, ces murs qui sont si souvent tombés à cause de la pluie et
que j'ai toujours reconstruits. C'est drôle, quand on y pense.
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