jeudi 25 janvier 2024

A une Chaldéenne


Baruch est sourcilleux et veut te fustiger
Mais Dieu sait que tu vis et que tu veux aimer.



Ainsi que le faisaient les dames
Dans l’antique Babylonie,
Tu t’abandonnes à la vie
Parmi les trilles et les brames.

Sur un chemin, dans la campagne,
Ou sur un sentier de forêt,
Tu vêts un collier de genêts
Tandis que le désir te gagne.

Les hanches ceintes d’une corde
Que ta main voudrait dénouer,
Tu danses parmi les halliers
Souriant à ceux qui t’abordent ;

Parmi eux tu cherches le roi
Qui saura dénouer ton cœur
Et en vainquant ses propres peurs
Fera battre la vie en toi.

Jusqu’à son arrivée tu danses
Dans la beauté du jour naissant
Tandis que monte dans le vent
Le parfum des fleurs qui t’encense.

mardi 16 janvier 2024

Du massacre des Innocents

 

    Quelques temps après son entrevue avec les mages suivie de son échec à retrouver l’Enfant, le roi Hérode réunit un conseil de défense dont les débats restent secrets. Lorsqu’il en sort, il paraît devant ses sujets, la mine sombre, portant sur ses nobles traits la trace de ses larmes. Inquiet, son peuple l’interroge sur la cause de ses tourments. Il leur rappelle alors la visite des mages venus d’orient et leur apprend qu’il les a rencontrés secrètement un peu plus tard, puis il leur dit ceci :


Le roi :
Voici, mes chers amis, ce que m’ont dit les mages ;
Laissez-moi répéter les avis de ces sages.
Le démon Kikimou, être de perversion,
Est sorti du désert accomplir sa mission :
Privant l’humanité de ses menus plaisirs,
Il la soumet sans frein aux affres du désir,
Mais ne prenez pas peur, car il ne vous tue pas ;
Il ne fait que brûler vos plaisirs et vos joies.
Il change le vagin en hangar insensible
Et le sexe de l’homme en vermisseau risible.
Vous errerez sans but, mais vous serez vivants,
Sans joie et sans plaisir vous ferez des enfants.
Ainsi donc, mes amis, vous voila prévenus.
Pour moi, je vais pleurer vos jouissances perdues.

Le peuple :
Avant de nous quitter, dites-nous, majesté,
S’il existe un moyen d’éviter ce péril.

Le roi :
ô, mes amis, pitié ! Laissez-moi m’en aller !
Le moyen est affreux car le piège est subtil.

Le peuple :
Nous ne le pouvons pas ! Vous êtes sans espoir !
Nous avons peur pour vous, dites ce qui vous ronge.

Le roi :
Que ce démon est laid ! Que son dessein est noir !
Mon Dieu, que j’aimerais que ceci soit un songe !
Laissez-moi, mes enfants, porter seul mon tourment,
Et vous, mes chers sujets, allez dormir en paix.

Le peuple :
Comment dormir en paix, quand vous êtes souffrant ?
Révélez votre mal, partagez votre faix.

Le roi :
Vous allez regretter de m’y avoir forcé
Et je regretterai de m’être ainsi confié,
Mais nous sommes amis et je ne tairai pas
L’atroce vérité à qui dépend de moi.
Le démon Kikimou a pris corps parmi nous ;
Je sais qu’il est ici, mais la question est où ?
Il est dans un enfant de tout au plus deux ans…
Le monstre s’est terré au cœur d’un innocent !
Pour trouver le démon, trouvez son réceptacle,
Mais il faut pour cela rien de moins qu’un miracle !
Nous l’avons recherché dans toute la Judée
Mais l’être répugnant nous est resté caché.
Il restait un moyen, mais en était-ce un ?
Tuer tous les bébés pour accomplir nos fins ?
Il fallait un héros au bien sombre courage
Pour arracher le cœur d’un enfant en bas âge
Mais nous parlons ici de milliers de bébés,
De tous les nouveaux nés qui vivent en Judée !
Lorsque Dieu a voulu que mon peuple me sacre,
Il ne m’a pas choisi pour commettre un massacre.
Ce qui me ronge, amis, c’est que je suis coupable !
Mon devoir envers vous, voila ce qui m’accable.
Pour sauver vos plaisirs, je dois tous les tuer
Mais ce sont mes sujets et je dois les sauver !
Ce dilemme tragique est sans solution ;
Je ne puis en trouver, moi l’homme d’action.
Je suis paralysé par mon propre devoir.
Laissez-moi m’en aller. Mon cas est sans espoir.

Le peuple :
Vous êtes notre roi, bien digne de l’amour
Que nous vous vouons tous, et cela pour toujours !
Votre devoir est clair, tout comme l’est le nôtre ;
Nous saurons vous montrer combien nous sommes vôtre.
Ce crime abominable est certes repoussant
Mais sauver notre roi est un motif puissant.
Allez vous coucher, sire, et faites-nous confiance :
Votre peuple se lève et prend votre défense.



Note : Je ne suis peut-être pas l’inventeur du nom « Kikimou ». Si c’est toi, M.A., qui as créé cette blague, j’espère que l’usage que j’en ai fait te satisfait.



Postface :

    Ces dernières semaines, en écoutant les éditoriaux de l’antipresse sur YouTube, j’ai entendu son rédacteur en chef, Slobodan Despot, déclarer plusieurs fois que les chercheurs modernes doutaient de la véracité du massacre des innocents. Or, nous savons tous que la particularité des récits du Nouveau Testament est qu'ils sont plus vrais que la réalité. Par conséquent, je me suis demandé comment le roi Hérode était parvenu à cacher son crime et à faire taire les témoins. Vous venez de lire ma réponse à ces questions.


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